L'Angerie, 14 déc 2001
Chère Elisabeth,
Je relis votre dernière lettre. Je me sens
un peu gêné car j'ai l'impression d'avoir touché un point sensible,
sans le vouloir. Votre texte témoigne aussi d'un malentendu entre nous.
J'ai lancé quelques idées, pour en débattre, comme
un joueur qui distribuerait des cartes. Je vous vois alors reprenant
ces thèmes avec méfiance, sans doute parce que vous vous faites de moi
une idée un peu fausse. C'est un peu normal si on imagine "quelqu'un
qui a un nom à particule et qui vit dans un château". Je vous concède
qu'il y a beaucoup d'imbéciles dans cette faune-là. Il existe tout un
pan de ma (vaste) famille qui ne vaudrait même pas la mention d'une
ligne dans nos courriers. Mais l'expérience m'a montré que s'il y avait
"des cons de riches", il y a aussi des "cons de pauvres".
Ca n'est pas moi qui suis l'auteur de cette formule,
c'est Jean Gabin, dans le film "la Traversée de Paris". Dans
ce scénario Bourvil fait du marché noir. Il traverse donc Paris avec
deux valises pleines de viande, denrée recherchée à cette époque-là.
Gabin, personnage un peu mystérieux, l'accompagne. Je ne sais plus très
bien comment s'est opérée la rencontre de ces deux-là. Ils échappent
à quelques patrouilles Allemandes (la nuit, le couvre-feu est de rigueur).
A un moment ils sont dans une café, avec "de bons français".
Ceux-ci les questionnent sur leur étrange voyage nocturne. Une des valises
se trouve ouverte, je ne sais plus par qui ni pour quelle raison, et
Gabin dit aux personnes rassemblées dans le café :
- Allez-y, servez-vous. Il y a du boeuf, des saucissons.
On vous les offre. Il n'y a aucun risque. Allez-y, nom de Dieu !
Mais personne ne bouge, personne
n'ose. Quelqu'un qui offre en pleine guerre des marchandises aussi recherchées,
ça n'est pas normal, cela doit cacher quelque chose. Alors Gabin lâche,
méprisant :
- Cons de pauvres ! ....
Un Gabin qui, dans le film,
n'était pas "aristo" mais portraitiste. En tout cas, les voyages
que j'ai pu effectuer dans les différentes couches de la société m'ont
toujours montré que les pourcentages des différentes catégories : les
cons, les imbéciles, les courageux, les intègres, les lâches, étaient
les mêmes. Alors ne sortez pas votre Kalachnikov préventivement. Il
n'y a pas que des couillons chez "les gens à particules".
Nous aussi, nous avons un coeur et un cerveau.
Eh puis, j'ai l'impression que vous
vous méprenez quant au sujet de discussion vers lequel je souhaiterais
nous conduire. J'ai parlé paranormal, spiritisme. Vous avez sans doute
imaginé aussitôt une bande de "bourges" assemblés sous les
lambris, se livrant à quelques expériences, en toute mondanité. Mais
je souhaite par ce biais aborder des questions autrement plus vastes
que celles de nos misérables petites existences humaines. Vous verrez
plus loin.
Je ne
souhaitais pas vous donner "une leçon de paranormal". Vous
m'avez parlé de votre passé le plus intime. Je vous remercie de m'avoir
accordé cette confiance. Vous êtes donc sujette à des crises d'épilepsie.
J'ai peu d'expérience en la matière. Je sais seulement qu'un jour j'ai
vu un homme, sur un grand boulevard Parisien, tomber comme une masse
et être pris de tremblements. Les gens de la terrasse de café voisine
l'ont regardé avec curiosité. J'ai tout de suite compris et j'ai réclamé
la serviette du garçon pour la lui glisser entre les deux dents et éviter
qu'il ne se morde la langue, puis j'ai demandé que quelqu'un appelle
police secours ou le Samu. Si je n'avais pas fait cela, je suppose que
ce pauvre homme serait resté là, spectacle de choix pour ces gens attablés.
J'ai une autre histoire, très triste celle-là.
J'avais un ami biologiste qui avait un fils épileptique. Il s'était
orienté vers la neurologie. Le gamin, qui avait vingt ans, souffrait
de ce qu'il percevait comme une infirmité et souhaitait le plus possible
"vivre comme les autres jeunes". Un beau jour il s'est ...
noyé dans la piscine, sans crier gare, à quelques mètres du reste de
la famille. Personne n'avait pensé qu'un épileptique qui se baigne doit
être équipé d'une mae west ou rester sous surveillance. Mon ami sorti
de cet épisode broyé à vie.
Ainsi votre cerveau vous aurait
joué des tours. Mais qu'est-ce qu'un cerveau ? J'ai rencontré un jour
un jeune Allemand, qui était "calculateur prodige". Il devait
avoir dans les trente ans. Très sympathique, et extrêmement spectaculaire
sur scène. Son cerveau avait de vastes pans de mémoire occupés par d'immenses
tableaux de chiffres. Pourquoi ? Mystère. Mais il parvenait tant bien
que mal à "assumer sa différence".
A vous entendre, vous êtes aussi différente. Il y
a dans votre récit des éléments qui se réfèrent à des tas de choses
classées depuis des lustres, comme le fait de ne pas pouvoir nommer
des objets que l'on voit. On relie cela en principe à des difficultés
"d'interface" entre cerveau droit et cerveau gauche. Le votre
semble sujet aux faux-contacts. Ca ne doit pas être drôle tous les jours,
d'autant plus que l'entourage a sans doute du mal à comprendre ce genre
de singularité, vite assimilée à une sorte de "folie contagieuse",
pour reprendre votre propre expression. Vous écrivez :
- Le cerveau des épileptiques est ingrat, qui bat
son hôte de corps jusqu'au supplice.
Je ne vois guère de phrase de
commentaire à ajouter à vos confidences. Je ne voulais pas "vous
pousser dans vos derniers retranchements". Mais le cerveau est-il
"de l'électronique de pointe" ?
Vous
évoquez les prémonitions en signalant la vanité des messages reçus.
Je connais une personne qui vit ce genre de chose presque au quotidien.
Elle devine les numéros des plaques minéralogiques des voiture garées
au coin de la rue. Ca n'est pas un artefact : elle a même fait l'expérience,
avec moi, de les noter sur un papier avant de les découvrir. Il y a
cela et d'autres choses toutes aussi dérisoires. Par contre, impossible
de prévoir un numéro de loto, par exemple, quelque chose qui puisse
être réellement utile ou profitable. On se croirait plongé dans le monde
d'Alice au pays des Merveilles, en s'attendant à voir surgir à tout
moment un chapelier fou et un lapin. Il ne reste plus qu'à prendre les
choses avec humour. Mon amie pense que c'est "son ange gardien"
qui lui communique ces messages. Etrange service. Qu'est-ce que ce type-là
faisait de son vivant ? contractuel; peut-être.
Je suis d'accord avec vous :
se lancer dans une grande études sur le paranormal finit souvent en
eau de boudin. Il existe une revue de l'association Ian Karadec, qui
s'intitule, je crois, "La revue de l'association spirite".
Les "spirites de France" y publient des articles, ennuyeux
à périr. On a envie de dire : à quoi cela sert-il ? A quoi cela rime-t-il
?. Maisons hantées, esprits frappeurs, poltergeists, etc. On verrait
très bien dans cette revue des rubriques comme "la prémonition
du mois" ou : "maisons hantées : nous avons testé pour vous...."
Vous m'avez vu me jeter à l'eau en
balançant, trop vite peut-être, des idées concernant un monde physique
et un monde "éthérique" ou "astral", selon le nom
qu'on lui donne. Il y avait aussi quelques (vagues) idées concernant
le devenir post-mortem. Cela s'est tout de suite mis à ressembler pour
vous à des discussions de salon.
Vous savez qu'à
défaut d'être un scientifique, je suis un "X", ancien ingénieur-conseil,
qui a pas mal lu. Je ne suis pas assez naïf pour ne pas me rendre compte
que nos scientifiques contemporains ne savent pas grand chose. Il faut
être assez candide pour se laisser bercer par les contes d'un Hubert
Reeves. Sa "poussière d'étoiles" ressemble beaucoup à ce que
distribue le marchand de sable dans "bonne nuit les petits".
J'ai appris à le lire et à l'écouter, celui-là. C'est là qu'on s'aperçoit
qu'il ne dit rien. Il "dégage", c'est tout. Il a un crâne
dégarni et une barbe, plisse ses yeux, a tenu après 40 ans de séjour
en France à conserver son accent canadien. Ca lui a un peu passé, mais
pendant des années, quand une autre personne sur le plateau parlait,
il opinait gravement du chef en signe d'approbation. Il me faisait alors
penser à ces petits automates qu'on plaçait dans les églises quand j'étais
enfant au moment de Noël, et qui hochaient la tête en guise de remerciement
à chaque fois qu'on versait une obole dans une ouverture prévue à cet
effet. Tout cela n'est qu'une comédie et je crois que Reeves n'est qu'un
comédien, un "représentant en science". Un jour cet animal
a d'ailleurs pris un raclée mémorable, il y a une douzaine d'années,
dans une émission littéraire animée par le journaliste Michel Polac.
Sur le plateau étaient présents des professeurs de philosophie, dont
certains étaient venus présenter leurs derniers ouvrages. A un moment
l'un d'eux explosa littéralement, s'adressant à Reeves :
- J'ai lu votre ouvrage. Il y a des choses que vous
dites qui ont déjà été amplement abordées par Kant, Spinoza, Hegel.
Eux, avaient en leur temps brillamment soulevé ces questions. Sous votre
plume, celles-ci deviennent des philosophades. Une idée me vient. Dans
quelques décennies vous aurez disparu. Je conjecture que si Kant, Spinoza
et Hegel resteront dans les mémoires des hommes, personne ne se souviendra
plus de vous !
Il y avait du vrai dans ce que
disait cet homme. Ca n'est pas bien de livrer aux gens de la "pensée
jetable". En règle générale, nos "grands scientifiques"
ont cessé de longue date d'être des philosophes, comme pouvait l'être
un Leibniz. Les temps ont changé et les cervelles volent au ras de pâquerettes.
Personne n'oserait plus prononcer le mot "métaphysique", véritable
tabou. Dès que ce mot est prononcé, on songe automatiquement à des séances
de tables tournantes, à des thèmes astrologiques et autres. Et tout
cela a mauvaise presse, est relégué dans des librairies spécialisées,
véritables ghettos, qui font recette d'ailleurs. Pourtant, quand j'avais
fait "mes humanités", le cours de philo comprenait trois sections
: "logique", "morale" et "métaphysique".
Que reste-t-il de ces trois "disciplines ? Une licence de philo,
de nos jours, c'est devenu quoi ?
Cela me fait penser à la boutade soixante-huitarde
:
- Dieu est mort, Marx est mort, et moi-même je ne me
sens pas très bien.....
Vous devez vous dire : il tourne,
vire, comme à son habitude, accumule les digressions, les anecdotes
et les périphrases, mais où veut-il en venir ?
J'y viens, Elisabeth, j'y viens....
Dans un précédent courrier,
je chevauchais l'idée (qui n'est pas mienne) selon laquelle deux monde
"parallèles" pourraient coexister et interagir, l'un étant
notre monde physique et l'autre un supposé monde métaphysique. Notre
monde physique est censé obéir à un certain nombre de lois qui lui sont
propres. J'avais repris cette hypothèse (d'origine hindouiste) selon
laquelle le "monde invisible" pourrait, lui aussi, avoir une
nature corpusculaire (les "particules subtiles" des textes
dits "ésotériques"). J'avais repris l'idée selon laquelle
"tout ce qui est en haut est comme ce qui est en bas", c'est
à dire que tout objet ou structure dans l'ici-bas aurait sa contrepartie
dans l'au-delà, mais que ces structures du monde invisible ne recopiaient
pas nécessairement à l'identique les structures du monde physique, et
j'avais esquissé le thème des "chakras".
J'ai vu que cette balle lancée
n'avait, chez vous, suscité aucune curiosité. Cela peut se comprendre,
nous restions au niveau de l'individu. Mais imaginons maintenant que
"Gaïa", la Terre, cette entité faite à la fois de montagnes,
d'océans, d'air et d'une fine couche de moisissure vivante sur sa surface,
dont nous faisons partie, possède sa propre noosphère, ou plus précisément
que les "agrégats" de "matière subtile" qui constitueraient
les structures psychiques des êtres humains ne soient que des éléments
d'une vaste machinerie planétaire à l'échelle de la planète. Appelons-là
"noosphère planétaire ".
En matière d'évolution vous devez savoir
que nos connaissances sont voisines du zéro absolu. Même constat à propos
des origines de la vie. On ne sait de nos jours pas si les premiers
êtres vivants se seraient formés à la surface de la terre, ou dans les
profondeurs des océans, au voisinages de "fumeurs" sous-marins,
de sources thermales. On ne sait même pas si certaines molécules-clefs
de la chaîne du vivant ne se seraient pas formées carrément dans le
cosmos. J'ai lu quelque part qu'il y avait au voisinage du centre de
notre voie lactée un nuage de matières, que l'on peu peut considérer
comme organiques, atteignant 500 masses solaires. Ca n'est pas une spéculation,
c'est une donnée fiable issue de la spectroscopie. Que font cet acide
formique, cet alcool éthylique, etc.... à cet endroit-là. Le cosmos,
décidément, est un vrai bouillon de culture.
En matière d'évolution,
il n'y a rien de crédible. J'ai lu Anne Dambricourt. Cette femme a étudié
l'évolution du crâne humain depuis seulement quelques siècles. Elle
a repris toutes les données disponibles, en les traitant simplement
de manière différente, avec des critères plus affinés. Le "progrès"
de l'espèce humaine ne se mesure par exemple pas en se polarisant sur
"l'angle facial". J'ai un ami mathématicien qui possède un
cerveau apparemment d'assez petite taille, un fort bourrelet orbitaire
et un front fuyant. En le vêtant d'une peau de bête on en ferait un
type de l'âge de pierre parfait. Pourtant c'est un maître ès-géométrie
algébrique. Est-ce un progrès d'avoir accès à la géométrie algébrique
? C'est un autre problème. Toujours est-il que ce gars ne ressemble
pas à ce qu'il est vraiment.
Anne Dambricourt
montre que l'évolution humaine, par rapport aux primates d'où les hommes
sont censés être issus passe par un mouvement d'effacement de la mâchoire
sous les os de la face et sous la boite crânienne. Notre "museau"
a déjà disparu. Nos mâchoires reculent. Les os de la face se sont progressivement
disposés sous la partie frontale de la boite crânienne. Corrélativement,
la place disponible pour loger des molaires diminue. D'où ces "dents
de sagesse" qu'on finit très souvent par arracher parce qu'elles
ne trouvent plus de place pour pousser.
Dame Dambricourt a travaillé en contact étroit avec
des orthodontistes et montré que ces problèmes dentaires avait tendance
à s'accentuer de manière spectaculaire depuis seulement quelques décennies.
On pourrait se dire : "oui, dans les pays développés". Eh
bien non : le phénomène est apparemment planétaire. Le mécanisme évolutif
de base de l'homme semble s'être brutalement remis en marche. Nous
devons vous attendre à devoir arracher de plus en plus de dents de sagesses
dans les années à venir, faute de place pour les loger, à la fois à
Washington, Oulan-Bator ou aux fins fonds de la Nouvelle-Guinée. Tout
cela bouscule complètement les idées darwiniennes selon lesquelles des
mutations aléatoires donneraient à certains individus des avantages
évolutifs, les rendant plus performants vis à vis des autres et leur
permettant d'imposer leur lignée au fil de.... millions d'années. Dans
une optique Darwinienne "normale" il faudrait au bas mot cent
mille ans pour que la forme des mâchoires humaines dans une région donnée
se modifie sensiblement. Or nous sommes loin du compte. L'évolution
mise en évidence est anormalement rapide.
Ce qui émerge de tout cela c'est une critique du darwinisme,
une critique de fond. La vie est-elle "pilotée" ? Pensée inacceptable
chez beaucoup de spécialistes. Figurez-vous qu'il y a deux ans des gens
du Muséum d'Histoire Naturelle de Paris avaient même lancé un projet
de colloque, au sein même du Muséum, dont le titre aurait été "de
l'irruption de la spiritualité dans les science". Dambricourt est
croyante et ne s'en cache pas, mais elle s'empresse d'ajouter que sa
foi chrétienne est totalement disjointe de la rationalité de ses recherches,
menées au sein du CNRS. Elle se battit énergiquement et reçut quelques
appuis. Le congrès eut lieu, mais ailleurs, tout simplement parce qu'Anne
Dambricourt ne disait point : "Dieu rétrécit les mâchoires humaines",
en tous points du globe, au même moment. Elle se contentait de poser
la question.
Nous sommes loin des tarots et des
tables tournantes, mais nous côtoyons de nouveau l'invisible. Qu'est-ce
qui a créé la vie, pourquoi et comment ? Nous n'en savons rien. Il est
simplement impossible de dresser un schéma complet de l'évolution dans
les différentes espèces, à cause des "chaînons manquants".
La thèse dominante du "gradualisme" n'est qu'une pure croyance
a priori. Prenez ce dessin que l'on voit souvent dans les musées, montrant
un bestiau quadrupède se redressant progressivement jusqu'à devenir
l'homme moderne, bipède. Or tous les éléments intermédiaires n'existent
simplement pas.
Prenez un ours. Il lui arrive de se dresser sur ses
pattes arrière pour voir plus loin, mais si quelque danger survient,
c'est sur ses quatre pattes qu'il prendra la fuite. Prenez un homme
qui, à quatre pattes, cherche ses clefs dans un parking. Agressé, il
filera aussitôt sur ses deux jambes. L'être hybride, mi-bipède, mi-quadrupède
n'est pas performant. Donc, selon l'essence même du darwinisme il ne
saurait exister.
C'est Yves Coppens qui a lancé
l'idée du singe arboricole devenu bipède pour mieux y voir, dans le
Rift Africain, suite à une modification de son écosystème : le passage
d'un milieu sylvestre à un paysage de savane. Cela justifiait l'apparition
de l'australopithèque dans cette Afrique de l'Est, à l'est du "rift",
de la ligne d'effondrement si bien marquée au Kenya par la falaise bordant
le lac Manyara. Hélas on n'a pas tardé à trouver des Australopithèques
bien plus à l'ouest, dans des régions de forêt. De plus l'articulation
du genou de l'australopithèque n'est pas une articulation de bipède.
Chez nous, fémur et tibia sont liés par le "plateau tibial".
Le fémur a deux fortes malléoles qui "roulent" sur ce plateau.
Sur ce plateau tibial une arête de guidage qui empêche le tibia de tourner
de plus de 5 degrés, de droite et de gauche. Un attribut de bipède,
typique. Pour pouvoir bien courir il ne faut pas que les pieds partent
dans tous les sens. Or cette arête de guidage est pratiquement absente
chez les Australopithèques qui devaient pouvoir tourner leurs pieds
de plus ou moins soixante degrés, donc devaient avoir des moeurs plutôt
arboricoles.
En conclusion : les schémas
évolutifs ne collent pas avec les réalités. On ne sait pas comment l'homme
est apparu. Au passage personne ne se hasarde, remarquez-le, à essayer
de définir ce que peut être un homme par rapport à un animal. Cette
conscience, dont nous sommes si fiers, est-elle apparue "progressivement"
? Le "gradualisme" est-il encore ici la règle directrice ?
Tout commence par des questions que
l'on pose, que l'on se pose. Ce qui est significatif, je trouve, c'est
la levée de boucliers qui a accompagné la publication de la thèse de
Dambricourt, comme elle avait fait oeuvre impie, avait proféré un véritable
blasphème scientifique.
Les temps ont changé. Si Darwin était
apparu plus tôt, on l'aurait brûlé. Si cela était encore possible, j'en
connais pas mal qui ne se gêneraient pas pour attacher Anne Dambricourt
sur un bûcher. En fait, la métaphysique est à nos portes, au moment
où notre physique marque le pas, où notre astrophysique et notre cosmologie
se dégonflent comme des soufflés. Par métaphysique il faut entendre
une coévolution entre deux plans d'univers, un seul étant accessible
à nos sens. Vous voyez l'idée :
- D'un côté il y a le monde physique, qui obéit à ses
propres lois et qui suit un processus entropique, second principe oblige.
- De l'autre un monde métaphysique évoluerait "parallèlement"
en suivant ses propres lois "métaphysiques".
- Entre les deux une interface nommé "Vie"
permettrait cette coévolution. Là serait la raison ontologique de l'apparition
du vivant. Vaste programme de réflexion. Qu'en pensez-vous ? Accepterez-vous,
cette fois, de me suivre dans cet espace spéculatif, ou allez vous déployer
le rideau de fumée de vos boutades en m'expliquant que cette thèse (le
recul de la mâchoire) explique pourquoi l'ethnie extraterrestre des
"petits gris" qui nous visitent n'ont plus ni nez, ni pavillons
auriculaires, et presque plus de mâchoire ?
Cela ne nous empêchera pas de continuer
à parler de thème d'actualité. Mais il faut bien occuper un peu son
temps à laisser la pensée gambader en liberté, d'autant plus que je
crois... les deux choses intimement liées. Mais ça sera pour les courriers
suivants.
Nous suivons, comme vous,
sur nos petits écrans, ce qui se passe dans le monde. Horreur en Cisjordanie,
bide en Afghanistan. Les Américains réussiront-ils à mettre le grappin
sur Omar et son copain Ben Laden ou ceux-là, profitant des complicités
tribales, auraient-ils déjà réussi à trouver refuge au Pakistan ? Décidément,
dans ce coin du monde, tout le monde ment. Les B-52 mènent le jeu. Les
Afghans, Kalachnikov à l'épaule, comptent les points. De temps en temps
des gens se rendent en masse. On en égorge certains, on laisse les autres
retourner dans leurs villages et le camp de concentration construit
par les Américain n'a pas l'air de contenir grand monde, sauf erreur.
Les Afghans précisent qu'ils espèrent que les Américains ne tarderont
pas à rentrer dans leurs foyers. Les femmes continueront à être traitées
en bêtes de somme, cloîtrées sous leurs burkas.
Ben Laden
a peut être rendu un grand service à la planète avec la monstruosité
des attentats du 11 septembre. Sur ce plan ces extrémistes islamistes
sont des imbéciles. Au moment où commençait l'attaque sur Kandahar on
a entendu le Mollah Omar dire "qu'une masse d'attentats allait
s'abattre sur les Etats-Unis". Mais il ne s'est rien passé. Peut-être
certains ont-ils compris à qui ils s'en étaient pris. L'Amérique est
un géant qu'il ne faut pas réveiller. Les Japonais en ont fait l'expérience.
Les attentats de septembre ont été une blessure profonde, plus violente
encore que l'attaque sur Pearl Harbour, qui visait des cibles militaires.
Périodiquement on entend les responsables Américains dire que "cette
guerre contre le terrorisme ne fait que commencer". Ils ont annoncé
"qu'après l'Afghanistan, d'autres pays ayant apporté leur soutien
aux terroristes seraient visés" (dont l'Irak, apparemment).
Je ne sais pas si Ben Laden a eu raison de lancer
ces actions si spectaculaires. Ce faisant il a humilié les Etats-Unis.
Pour le Viêt-Nam cela pouvait encore se discuter. Aux USA, des voix
s'élevaient pour dire : "nous n'avons rien à faire là-bas".
Mais là il s'agit d'une agression, lâche et sans préavis, sans motif
explicite non plus, autre que la haine. Après ces attentats les Américains
n'ont pas cédé à la colère, n'ont pas lancé une riposte précipitée.
Il ont pris leur temps, mais apparemment, techniquement, cette opération
Afghanistan a été bien menée. Les Russes avaient averti : "ne mettez
pas les pieds dans ce pays !". Les Américains ne l'ont pas fait.
Comme les Talibans devaient encore posséder quelques missiles Stinger
capables d'envoyer au tapis des appareil volant à moins de 3000 mètres
d'altitude ils ont bombardé de plus haut, apparemment avec une précision
étonnante : de simples villas atteintes en plein coeur de centres urbains,
à Kaboul. La précision des bombes guidées par laser est étonnante :
quelques mètres.
Bien sûr, Omar et ben Laden se sont peut être
faits la malle, à cause de complicités. Mais leur prestige en a pris
un coup. Le prochain visé sera peut-être Saddam Hussein, qui pourrait
être sommé de disparaître. Je parierais que cet imbécile a pensé pouvoir
jouer impunément sur tous les tableaux : constituer vis à vis des Américains
une sorte de rempart contre l'Islamisme Chiite, tout en finançant les
groupes de Ben Laden, directement, et en leur apportant un support logistique
et technique. Si les Américains ont mis la main sur des preuves d'une
chose pareille, malheur à lui. Ils ont clairement annoncé "nous
poursuivrons les auteurs des attentats ainsi que tous les pays qui ont
apporté leur support à ces actions". Quand les yankees disent que
"cette guerre sera longue" cela signifie peut être que la
liste doit être longue. Saddam a des bunkers, mais il existe des bombes
US capables de toucher des cibles à trente mètres de profondeur.
Ma fois, ça fait un peu tomber
les masques. Il y a un endroit où la situation semble se radicaliser,
c'est Israël et la Palestine. Que penser d'Arafat ? J'ai suivi un reportage
où des terroristes palestiniens encagoulés disaient qu'ils faisaient
partie des 32 personnes dont les Israéliens avaient exigé l'arrestation
mais que, prévenus par les hommes d'Arafat qu'on allait tenter de leur
mettre la main au collet ils avaient pu prendre le large, en étant prêts
à tuer de nouveau. Arafat joue-t-il double jeu ? Sharon l'affirme. Il
dit peut-être vrai. Ceci étant, si c'est vrai, comment faire cesser
cette guerre civile atroce alors même que les deux populations sont
étroitement imbriquées, formant une mosaïque inextricable ? Je ne vois
pas de solution. Ces attentats quasi quotidiens sont insupportables.
Où allons-nous avec tout cela ?
Vous devez vous dire : quel
lien avec le paranormal ? J'ai évoqué un possible "pilotage du
vivant". Il semble bien que le hasard n'est pas capable à lui seul
d'organiser le vivant.
Le vivant évolue, au gré de batailles rangées
entre espèces. Mais, dans cette sélection naturelle, qui distribue les
cartes ?
Il y a quelque chose à comprendre
dans tout cela. Nous sommes spectateurs d'évènements et nous pouvons
peut-être affiner notre compréhension si nous essayons d'aller au delà
du simple enregistrement des faits. Je développerai cela dans un autre
courrier. Cette lettre me semble déjà assez longue. Mais peut-être entrons-nous
dans un âge de violence.
Amicalement
Félix
à compter du 16 décembre
2001
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